Autoportrait au revolver
D’effleurements en hésitations, on finit par ne pas connaître véritablement les personnages qui habitent les pages d’Autoportrait au revolver. Et c’est dommage…
On a souhaité ardemment en apprendre plus sur Angélique, cette femme obèse qui n’aime pas son corps et qui accepte d’être l’objet sexuel de Keith qui, lui, abuse de sa vulnérabilité. Et aussi sur June, la femme de Ringo qui disparaît, laissant derrière elle un mari désemparé et une fille, Nathalie, en mal de vivre. Et puis Joseph, ce vieil indien, un peu sorcier (c’est cliché…) et dont on ne sait absolument rien sauf qu’il a été maltraité dans sa jeunesse. Il y a aussi les Dubé et autres personnages qui passent, en laissant une trace, puis disparaissent, silencieusement.
Finalement, il y a trop de gens, on les dirait placés là pour leur simple utilité dans le récit, une manière d’arriver à ses fins sans avoir à expliquer. Malgré certaines formulations parfois maladroite, la plume de Marie Christine Bernard se fait belle, poétique même : «La musique qu’on portait en soi n’existe plus qu’en ritournelle ténue, mots sans suite, airs sans mélodie que l’on fredonne pour soi, et qui ne font plus danser que la mort dans sa patience.». Ça console un peu.
Puis, il y a Jude, jeune homme définitivement schizophrène qui s’accroche à la musique classique, à la couleur qu’il dépose sur la toile et à sa vieille chatte Cassandre dont la psychologie va au-delà du félin aveugle qu’elle est devenue. Jude, c’est le fils de Nathalie, le petit fils de Ringo, c’est le jeune homme qui va visiter son grand-père dans la résidence privée où Angélique, Keith et Joseph travaillent, c’est le centre de toute cette histoire trop courte, de ce roman qui nous laisse sur notre faim. Parce qu’on voudrait tellement savoir ce qui arrivera après, savoir pourquoi Keith est si méchant, connaître le mystérieux Joseph. Mais non, et c’est dommage…